Est-ce le mot "innovation" qui perturbe ou bien est-ce la crainte de remettre en cause plus d'un siècle de pratiques managériales issues du monde industriel, qui certes ont évolué, mais sont surtout restées sur le modèle hiérarchique "commande/contrôle" cher à Fayol ? La transformation numérique, la crise sanitaire récente ont de nouveau bousculé les acquis et les certitudes managériales et nous interrogent sur notre capacité à nous adapter rapidement aux évolutions de notre environnement. Et l'innovation managériale, qui n'est, somme toute, que la mise en mouvement des différentes composantes de l'entreprise pour répondre au développement de l'activité, semble aujourd'hui une réponse aux carcans organisationnels qui bloquent souvent la créativité, mais surtout la capacité des entreprises à être suffisamment agiles et flexibles face aux contraintes externes.

Ces deux dernières décennies, les secteurs social et médico-social ont connu de profondes mutations, influencées par de multiples facteurs, comme les réformes successives des politiques publiques, l'avènement des démarches qualité, de la performance... Or, "l'injonction au changement", soutenue par des méthodes classiques de management entraîne, le plus souvent, une perte de sens chez les professionnels et donc, une souffrance au travail. En effet, "on empile les réformes, les projets, les initiatives. On met l'ensemble du système dans une agitation permanente comme si ce bouillonnement allait sortir magiquement une nouvelle organisation plus satisfaisante, comme si le changement était en lui-même facteur de progrès et comme si tous ceux qui résistaient étaient des conservateurs uniquement par leurs droits acquis".

Ces quinze dernières années, les secteurs social et médico-social ont connu de profondes mutations, qui les ont conduits à déconstruire leurs anciens schémas, pour s'ouvrir à de nouvelles configurations, avec une centralité affirmée - celle du bénéficiaire comme sujet de droits... L'enjeu est de taille pour les cadres de l'intervention sociale, puisqu'ils doivent être en capacité de construire des réponses innovantes et adaptables aux diverses situations rencontrées, tout en considérant les évolutions environnementales ; ce qui implique qu'ils développent un certain nombre de compétences en matière d'expertise, de diagnostic, de conduite de projets, d'apprentissage au changement, ainsi qu'une véritable ingénierie de la prise de décision...

Le projet inclusif considère la personne accompagnée comme moteur de sa propre vie au sein d'une collectivité, quelle qu'elle soit. Dans cette conception, les potentialités des personnes sont au coeur d'une action sociale centrée sur une adaptation de l'environnement à tous les citoyens, et non l'inverse...

Les établissements et services sont invités à repenser leurs modes d'organisation et de fonctionnement, en proposant de nouvelles modalités de régulation et de coopération...

Ce numéro a pour objet d'interroger la réalité du métier de Directeur(trice) : quel rôle lui est-il dorénavant donné de "jouer" ? Quelles sont les marges de manœuvre et de négociation ? Comment analyser les dimensions psychoaffectives à l’œuvre au sein des différents systèmes qui composent les organisations sociales ou médico-sociales ? Et au final, de quels leviers dispose-t-on pour envisager de "prendre soin" des responsables d'ESSMS ?

Il s'agit de réfléchir ici les conditions de la réflexion éthique à l'occasion d'une expérience d'accompagnement - en position de consultant externe - d'une équipe pour la rédaction de son projet d'établissement...

Ce numéro a pour objet d'examiner à travers différentes grilles de lecture et de témoignages de terrain, la manière dont les responsables d'ESSMS s'emparent de cette question du changement en univers complexe...

Il s'agit aujourd'hui, au sein des associations, des établissements et services sociaux et médico-sociaux, de relever un défi capital : définir un contrat social, des relations professionnelles et des modes de coopération acceptables par le plus grand nombre...