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Le présent article interroge la portée heuristique d’une relation d’enquête hétéronormée dans le contexte monosexué qu’est la prison. En considérant la relation d’enquête comme un processus de socialisation parmi d’autres, il s’agit de comprendre ce que les rapports de genre peuvent, d’une part, révéler de la prison et, d’autre part, faire faire à la prison et à son ordre hétéronormé. Ainsi, l’analyse permet de mettre en exergue les carences en détention liées à la (quasi-) absence de relation hétérosexuelle, la complexité des systèmes de domination qui traversent la prison et la manière dont il est possible de nouer des relations à l’intersection de ceux-ci.
Les établissements pénitentiaires sont organisés sur la base du principe de l’incarcération séparée selon les sexes. Une telle binarité de genre, rigide et cisnormative, est problématique pour les personnes trans détenues. Cet article se base sur des interviews avec des personnes trans (ex-) détenues et des professionnel·le·s du milieu carcéral belge. L’analyse présente les expériences et les difficultés principales auxquels les personnes trans détenues font face : les décisions de placement et de transfèrement, les différentes formes de (micro-) agressions, l’organisation et l’infrastructure carcérale genrée, ainsi que le manque d’accès à certains services, articles et soins spécialisés.
Paru dans la revue Déviance et société, vol. 47, n° 2, juin 2023, pp. 243-281.
Mots clés : Justice-Délinquance, Prison, Femme, Détenu, Enfermement, Genre, Représentation sociale, Stéréotype, Norme sociale, Dévalorisation, Image de soi, Belgique
Sur la base d’une recherche empirique, le présent article vise à documenter le traitement des femmes incarcérées dans les prisons belges. Des observations et des entretiens ont été menés avec des femmes détenues dans 7 établissements pénitentiaires du pays, ainsi qu’avec des membres du personnel tant de services internes qu’externes. Les auteures analysent d’abord les conséquences pour les femmes de leur statut de minorité en détention, combiné au principe d’incarcération séparée selon les sexes. Ensuite, elles montrent comment les représentations genrées à l’œuvre dans les pratiques carcérales confèrent aux femmes un statut inférieur et dévalorisé au sein d’une institution pensée par et pour les hommes.
Les femmes font l’objet d’une importante invisibilisation dans les études dédiées au monde carcéral. La présente étude s’intéresse au profil des femmes incarcérées en Belgique francophone. Le cœur de cet article consiste à dresser un portrait descriptif de l’ensemble des femmes condamnées et incarcérées au sein d’un établissement belge francophone entre 2019 et 2021 (N=261). Par la mobilisation d’une approche quantitative, les dossiers pénitentiaires des 261 femmes composant notre population ont été consultés et analysés de manière systématique. Les résultats révèlent que ces femmes condamnées sont, pour la majorité, incarcérées pour des infractions contre les biens et les propriétés – de nature non violente – et présentent par ailleurs une série de vulnérabilités sur les plans social, économique, individuel et relationnel (faible niveau d’instruction, précarité professionnelle et de logement, présence d’une consommation de substances psychoactives, relations sociales dysfonctionnelles, etc.), soulignant ainsi l’existence d’un lien indéniable entre vulnérabilités et délinquance féminine. La mise en évidence d’une série de caractéristiques propres aux femmes incarcérées vient alimenter les connaissances à propos des femmes délinquantes et établir un point de départ pour identifier les éventuelles spécificités relatives à cette population et offrir, à ce titre, une base comparative future avec la population masculine.
Cet article cherche à expliquer la persistance de la notion d’homosexualité « situationnelle », mobilisée tant par la recherche que par le milieu pénitentiaire pour appréhender la question des sexualités en prison. L’homosexualité « situationnelle » se distinguerait d’une homosexualité supposée authentique et serait induite par la non-mixité de l’environnement carcéral. Ancrée dans les premiers travaux d’importance en sociologie carcérale aux États-Unis d’Amérique, cette notion n’a été que tardivement remise en question, à la faveur des apports féministes et queer. Cette contribution retrace de manière critique l’histoire de ce concept pour montrer qu’il a avant tout servi à consolider l’ordre hétérosexuel.
Article de Thomas Sévignon, Myriam Léon, Corinne Rostaing
Paru dans la revue Lien social, n° 1339, 9 au 22 mai 2023, pp. 18-24.
Mots clés : Justice-Délinquance, Prison, Réinsertion sociale, CONSEILLER D'INSERTION ET DE PROBATION (CIP), Sortant de prison, Atelier et chantier d'insertion, Réinsertion professionnelle, Restauration, Détenu, Prison des Baumettes
Les prisons françaises souffrent de nombreux maux. Notamment celui du manque de préparation des détenus à la sortie, étape essentielle pour éviter la récidive. Expérimenté depuis 2018, un nouveau dispositif pénitentiaire, la structure d’accompagnement vers la sortie (SAS), propose un accompagnement renforcé pour favoriser la réinsertion.
-Prison : des SAS pour préparer à la vraie vie
-Chantier d’insertion : le goût de l’évasion
-Entretien avec Corinne Rostaing : l’impensé de la sortie de prison
Paru dans la revue Actualités sociales hebdomadaires ASH, n° 3302, 7 avril 2023, pp. 28-31.
Mots clés : Justice-Délinquance, Détenu, Prison, Réinsertion sociale, Réinsertion professionnelle, Sortant de prison, Cuisine
Le premier restaurant de France en milieu carcéral ouvert au public est né à Marseille. En cuisines comme en salle, les détenus de la prison des Baumettes préparent leur sortie et leur réinsertion professionnelle.
Article de Yaëlle Amsellem Mainguy, Benoît Coquard, Arthur Vuattoux
Paru dans la revue Déviance et société, vol. 47, n° 1, 2023/1, pp. 91-120.
Mots clés : Justice-Délinquance, Prison, Surveillant de prison, Jeune, Adolescent, Détenu, Sexualité, Rapport sexuel, Genre, Contrôle, Contrôle social
Enquêter sur les conditions d’une jeunesse sexuelle derrière les barreaux permet de se pencher sur le travail de contrôle que des adultes exercent de façon plus ou moins directe sur la sexualité des jeunes. À partir d’une enquête empirique menée par entretiens et observations dans différentes prisons françaises, on s’intéressera à la place des surveillant·e·s en détention dans la gestion quotidienne de la sexualité, qui permettra une description des modalités du contrôle carcéral sur la sexualité et l’intimité des jeunes détenu·e·s. Plus généralement, cet article propose de considérer la prison comme espace de maintien de l’ordre genré, y compris en tenant compte de la configuration spatiale des prisons et des rapports sociaux entre professionnel·le·s.
Paru dans la revue Actualités sociales hebdomadaires ASH, n° 3299, 17 mars 2023, pp. 16-21.
Mots clés : Justice-Délinquance, Handicap, Prison, Discrimination, Souffrance psychique, Prise en charge, Handicap psychique, Détenu, Sanction
Les personnes détenues présentant des troubles mentaux, nombreuses dans les établissements pénitentiaires, sont régulièrement sanctionnées par la commission de discipline. Une discrimination en partie due à la non-prise en compte du facteur handicap dans les procédures.
Paru dans la revue Déviance et société, vol. 46, n° 4, 2022/4, pp. 453-487.
Mots clés : Justice-Délinquance, Surveillant de prison, Prison, Détenu, Femme, Nourrisson, Jeune enfant, Maternité, Parentalité, Enfermement, Vie quotidienne, Espace, Accueil enfant-parents, Ethnographie
En France, les nurseries pénitentiaires accueillent des femmes détenues avec leurs bébés dans des structures hétérogènes. À partir d’une recherche ethnographique menée dans deux quartiers nurserie, l’article met en lumière l’influence des dispositions spatiales sur les dynamiques de vie et de travail, pour, de là, se centrer sur des surveillantes affectées à ces espaces, dont l’activité s’avère aussi centrale que méconnue. L’analyse porte sur les subtilités et complexités de leur travail quotidien, à la source de l’élaboration d’un sens du travail et d’une identité professionnelle propres. Elles développent des savoir-faire pratiques et relationnels spécifiques, tout en subissant les injonctions contradictoires issues d’un système qui peine à les reconnaître.