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À partir d’une enquête sur plusieurs spectacles de Dieudonné, cet article analyse l’articulation entre l’antisémitisme et une critique réactionnaire des sociétés occidentales centrée sur la disparition des normes hétérosexuelles. Nous montrons que l’adhésion à cette articulation est d’autant plus forte qu’elle s’exprime dans l’espace-temps des représentations publiques, où Dieudonné met en scène sa stigmatisation tout autant qu’il la transcende. Dans l’interaction avec un public se sentant également stigmatisé, se constitue ainsi une « communauté déviante », à travers la transgression d’« interdits » perçus comme participant de l’effondrement moral des sociétés occidentales.
Article de Pedro José Garcia Sánchez, Samuel Bordreuil, Arnaud Frauenfelder, et al.
Paru dans la revue Déviance et société, vol. 44, n° 2, juin 2020, pp. 155-338.
Mots clés : Courants de pensée en sciences humaines, Sociologie, Délinquance juvénile, Déviance, Recherche en sciences sociales, Théorie, Méthode, Sociologue, Biographie, Parcours professionnel, Justice des mineurs, Transgression, Violence, Insécurité, Ethnographie, Cicourel (Aaron)
Ce numéro rassemble des contributions de chercheurs francophones stimulés par la sociologie d’Aaron Cicourel, par ses interrogations méthodologiques et ses intuitions heuristiques. La sélection des articles a essayé de garder un certain équilibre générationnel entre les auteurs : jeunes docteurs, chercheurs confirmés et professeurs émérites. Il en va de même avec les traditions intellectuelles dans lesquelles ces auteurs inscrivent leurs travaux pour resituer les innovations théoriques, restituer les défis méthodologiques et mieux identifier l’empreinte des travaux d’Aaron Cicourel dans l’histoire des sciences, à commencer par la porosité interactive entre sciences sociales et sciences cognitives qui la caractérise.
Paru dans la revue Déviance et société, vol. 43, n° 2, juin 2019, pp. 253-283.
Mots clés : Justice-Délinquance, Sanction pénale, Détenu, Stigmatisation, Morale, Déviance, Récidive, Discrimination, Réinsertion sociale, Théorie, Sociologie, Pouvoir
Cet article propose une réflexion sur l’hypothèse des caractéristiques de statut, issue de la perspective théorique de l’étiquetage, appliquée à la phase d’exécution des peines. Après un rappel théorique de la perspective, de ses limites et des révisions apportées, le sujet est exploré à partir d’une littérature principalement nord-américaine avec l’aide des concepts d’entrepreneur de morale (Becker, 1963) et de domination (Weber, 2013). Ils permettent d’appréhender la place essentielle des caractéristiques de statut dans le processus de réinsertion sociale et durant la phase d’exécution des peines. L’importance de ces caractéristiques de statut est considérée à la fois du côté des justiciables mais également du côté des professionnels à l’intérieur du système de justice pénale.
L’article propose une réflexion critique de nature historique, paradigmatique et scientifique « interne » du dispositif technique appelé pléthysmographie pénienne dans l’évaluation de la délinquance sexuelle. Ce dispositif, au départ à vocation médicale, a aujourd’hui pour mission d’identifier les inclinations sexuelles « déviantes » du justiciable. Malgré les failles quant à ses propriétés psychométriques, sa valorisation rend compte d’une conception particulière du délinquant sexuel qui ne peut que mentir et dissimuler sa sexualité « malsaine ». Ce phénomène repose sur le présupposé théorique de l’érection pénienne comme traductrice fidèle de l’excitation sexuelle. L’article fait le point sur les différentes critiques qu’on peut adresser au dispositif technique et à ses nombreux postulats problématiques dans une perspective historique.
Paru dans la revue Déviance et société, vol. 42, n° 3, septembre 2018, pp. 465-499.
Mots clés : Courants de pensée en sciences humaines, Sociologie, Médecine générale, Santé, Norme sociale, Pathologie, Entretien, Médecin, Relation soignant-soigné, Déviance
Le présent article se propose d’interroger le processus de normalisation à l’œuvre, au sein de la médecine générale, à partir d’un triple corpus des données recueillies dans plus de 800 articles de la revue Prescrire et une série d’entretiens auprès des médecins généralistes exerçant en libéral (N = 20) et étudiés en amont dans le cadre des séances d’observation in situ dans leur cabinet médical (N = 100h). L’ambition dépasse le seul cadre d’une sociographie des pratiques des soins et rend compte du contexte normatif qui cherche à réguler la production du pathos porteur de label médical. Étudiées au prisme des normes véhiculées dans la revue Prescrire, les relations soignants/soignés en œuvre dans les cabinets des généralistes participent de la fabrique des « anormaux », au même titre que les représentations qui parcourent les récits de ces soignants. L’article montre alors la place centrale que la médecine générale occupe au sein de ce processus, face à l’obsession contemporaine de la normalité, recouvrant à la fois l’élaboration collective des conduites individuelles, jugées non conformes selon un état de santé estimé pathologique, et le projet sociomédical de les « corriger ». Signaler la déviance biologique suffirait-il alors pour générer de la déviance sociale ?
Dans cet article, il s’agit de s’interroger sur une nouvelle forme de cybercrime : l’humiliation sur Internet. Définie comme l’atteinte à la dignité de la personne par l’image, celle-ci tend à toucher toutes les tranches de la population. Or, si la cyberhumiliation présente les mêmes caractéristiques que l’humiliation traditionnelle, Internet semble y ajouter de nouveaux éléments et notamment l’impossibilité de répondre à l’affront. À partir d’un terrain effectué avec des jeunes adultes, il s’agit ici de cerner les visions liées à l’humiliation numérique et d’identifier les moyens employés par les individus en vue de se protéger d’une telle déviance. Nous verrons que l’émergence de ces stratégies individuelles n’est en fait que la conséquence de l’inefficacité des moyens préconisés par les autorités en vue d’éradiquer cette cyberdélinquance.
Paru dans la revue Déviance et société, vol. 41, n° 2, juin 2017, pp. 167-201.
Mots clés : Justice-Délinquance, Criminologie, Sociologie, Biologie, Recherche en sciences sociales, Analyse de contenu, Discours, Théorie, Courant de pensée, Justice, Criminalité, Déviance, Délinquance, Bourdieu (Pierre), Etat unis
Cet article analyse la criminologie biosociale états-unienne, domaine de recherche cristallisé dans les années 2000, à l’aune de la théorie du champ de Bourdieu. Mêlant variables biologiques et sociologiques, le mouvement biosocial propose une science du crime étendue aux comportement antisociaux. Criminologie controversée, elle est l’œuvre principale de chercheurs qui se trouvent dominés au sein d’un champ criminologique fortement marqué par la sociologie. Bien qu’hétérogène, ce courant de recherche est généralement identifié à une minorité bruyante d’universitaires issus de facultés de criminologie et de justice criminelle peu prestigieuses. Une analyse des discours et pratiques de cette minorité bruyante permet de mettre à jour toute une panoplie de stratégies plus ou moins subversives vis-à-vis de la socio-criminologie dominante et destinées à augmenter leur volume de capital scientifique et académique.