Le fait religieux bouscule les pratiques du travail social. Tout manager peut un jour se voir confronté à une situation de « crispation » suscitant au sein de ses équipes des points de vue divergents. La difficulté à définir le principe de laïcité et à fixer la limite entre espaces public et privé a mené une poignée d’entre eux à s’emparer de cette problématique.

Le recueil, la transcription et l'analyse conversationnelle d'un corpus d'enregistrements de réunions d'une équipe interprofessionnelle d'intervention précoce ouvrent la voie à une étude directe et détaillée du travail social en train de s'accomplir, capable de montrer et de démontrer les actes épistémiques qui le constituent. La description détaillée de ces activités épistémiques met en évidence un processus ordinaire de scientifisation située du travail social par les travailleurs sociaux eux-mêmes, praticiens-chercheurs qui sont amenés à répondre méthodiquement et ingénieusement à des questions de grande portée. A partir d'une étude de cas réalisée au Portugal, dans le cadre d'une thèse de doctorat en travail social, c'est tout un travail ethnométhodologique de scientifisation secondaire, ancrée dans l'analyse de pratiques intrinsèquement réflexives et épistémiques, qui se dessine et qui est discuté.

La recherche s'est intéressée à l'activité générée par les parcours coordonnés de jeunes en situation de handicap du côté des parents et des professionnels. Ces derniers perçoivent majoritairement un déficit en matière des pratiques de coopération dans un espace encore très sectorisé entre médico-social, social, sanitaire et scolaire. Cependant, on voit poindre des embryons de compétences collectives en matière de résolution de problèmes liés à l'accès aux milieux ordinaires de socialisation, impliquant divers professionnels profanes ou spécialisés. La place tenue par les familles et les jeunes, le degré d'affirmation de leur projet de vie, suscite parfois des tensions qui, loin d'être un obstacle, peuvent devenir une garantie de dynamisme dans la prise en compte des besoins et attentes des usagers.

En tant que chercheurs, "compagnons de route" du travail social et des centres de formation en travail social, attachés au développement de la recherche en travail social, nous saisissons cette tribune pour exposer pourquoi nous pensons que cette recherche devrait donner une forme de priorité (ce qui n'est pas une exclusivité) à la question de l'analyse de ce que nous appellerons "les métiers en actes" et à la professionnalisation. Cette contribution n'engage que nous-mêmes.

Le travail social a toute légitimité à s'inscrire dans la démarche de développement social comme acteur-partenaire du fait de ses missions, de ses savoir-faire et de ses valeurs. Le développement social pourrait être considéré comme l'aboutissement de la démarche des travailleurs sociaux (de l'intervention sociale d'aide à la personne, ISAP, à l'intervention sociale d'intérêt collectif, ISIC) pour mieux répondre à leur visée de changement social.

Ce texte est une réflexion critique sur la question de l'intervention sociale face aux questions du développement social. Le propos aborde l'importance de la conception et de l'utilisation de la notion de territoire et se prolonge sur l'implication des différents acteurs (professionnels et usagers) dans un contexte politique tendu. Des thèmes comme la "frontière symbolique" ou les "actions collectives" illustrent les enjeux à l'oeuvre dans les mutations contemporaines de l'intervention sociale.