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Les termes choisis pour évoquer l’épidémie de Covid-19 révèlent plusieurs types de rapport à cet évènement inscrit dans la durée : les représentations changent selon le genre, l’âge, le diplôme, la catégorie socioprofessionnelle, et selon la position dans la sphère domestique et la confrontation directe à la maladie. À partir de l’exploitation statistique de réponses à une question ouverte posée lors de deux passations d’une enquête portant sur le coronavirus entre avril et juin 2020, sur un même panel, nous mettons en lumière deux rapports très différents à l’épidémie : une relation personnelle qui se rencontre davantage chez les femmes et consiste à appréhender les effets de la maladie à l’échelle de l’espace domestique ou de sa santé individuelle, et une relation politique, plus masculine, qui se situe à une échelle plus globale. Alors que la relation personnelle reste relativement stable, la relation politique est plus fluctuante, et fait l’objet de reformulations successives.
Si les pratiques du vélo sont sous-tendues par des enjeux considérables, tout le monde n’est pas disposé à en faire. Durant l’adolescence, les filles sont sensiblement plus nombreuses que les garçons à abandonner le vélo, et ce clivage est particulièrement marqué dans les Quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Notamment en raison de puissantes normes d’appropriation masculine de l’espace, associées à des pratiques éducatives très sexuées, les filles sont fortement susceptibles d’incorporer des inclinations à protéger son corps, à craindre de se déplacer seule, de s’aventurer, et de stationner dans l’espace public, limitant grandement leurs possibilités réelles de pratiquer. L’article montre que la prégnance de ce constat n’empêche pas d’observer, chez des filles d’une même classe d’âge et résidant dans des QPV particulièrement défavorisés des métropoles de Strasbourg et de Montpellier, des socialisations cyclistes variées révélant d’importantes inégalités d’opportunités. Si les injonctions auxquelles elles sont sujettes les poussent à mettre en place des stratégies pour se préserver ou se protéger, toutes ne développent pas les mêmes compétences, croyances, et dispositions. Ainsi, l’article illustre, d’une part, l’enjeu d’étudier comment s’articulent les socialisations urbaine, « mobilitaire », sportive, sanitaire et écologique des individus et, d’autre part, la grande diversité des manières d’habiter et de se déplacer observables dans les quartiers défavorisés.
Paru dans la revue Sociétés et jeunesses en difficulté, n° 26, automne 2021.
Mots clés : Territoire-Logement, Jeunesse-Adolescence, Jeune, Milieu urbain, Eau, Crise, Jeu, Politique, Habilitation, Expérimentation, Banlieue
Cet article a pour objet les « geysers » de la canicule de juillet 2015. Ces phénomènes causés par l’ouverture « sauvage » des bouches d’incendie dans des villes de la banlieue parisienne ont été traités par les pouvoirs publics comme des sortes d’émeutes. Le texte rend compte également d’une expérimentation conduite pendant l’été 2016 rendant légale et sans risque l’ouverture des bouches d’incendie. Ce texte est l’occasion d’une réflexion sur l’habilitation des jeunes comme acteurs politiques, rendue en partie possible par l’emploi d’un cadre théorique articulant les concepts d’expérimentation, de maîtrise d’usage et de ville récréative.
Paru dans la revue Sociétés et jeunesses en difficulté, n° 26, automne 2021.
Mots clés : Jeunesse-Adolescence, Élève, Minorité culturelle, Identité, Enfant de migrant, Adolescent, Communauté, Établissement scolaire, Quartier, Mixité sociale, Religion, Bruxelles
Certaines affirmations identitaires juvéniles dans les quartiers populaires tendent parfois à être interprétées comme un signe de repli ou de refus d’intégration dans la société. Or, le processus de construction identitaire en contexte d’immigration ou en situation minoritaire se distingue par son caractère dialectique et multidimensionnel. L’article analyse comment les élèves de deux établissements scolaires bruxellois mobilisent différents répertoires ethnoculturels et négocient l’incidence de ces référents sur leur identité. Les résultats de cette enquête menée auprès de 21 élèves âgés de 15 à 18 ans mettent en lumière la réflexivité dont ils font preuve. Si le cadre scolaire et le caractère fédérateur ou ségrégatif des catégories sociales et ethnoculturelles circulant dans son enceinte structurent de manière contrastée les identifications des élèves, l’article démontre que ces derniers n’ont pas la volonté de se réfugier dans les référents ethnoculturels de la communauté environnante (celle du quartier, de la communauté religieuse, de la famille) et ont la capacité de raisonner leurs choix et de prendre position.
Article de Kim Stroumza, Anne Françoise Pont, Marc Pittet, Flavio Fersiniet al.
Paru dans la revue Sociétés et jeunesses en difficulté, n° 26, automne 2021.
Mots clés : Enfance en danger-Protection de l’enfance, Placement, Pratique éducative, Vie quotidienne, Coéducation, Participation, Parents, Enfant placé, Suisse
Cet article s’intéresse aux moments de coprésence entre parents, enfants et professionnels en appui sur des activités de l’ordre de l’ordinaire (jouer, manger, se promener…) à l’intérieur de dispositifs d’aide contrainte du champ de la protection de l’enfance, et plus particulièrement dans un dispositif de placement suisse. Nous faisons le pari que dans ces moments particuliers peut se jouer d’un point de vue éducatif quelque chose de spécifique, qui exige d’être mieux compris pour être pleinement exploité. Être présent, participer à un tel moment de coprésence ne comporterait pas les mêmes exigences ni ne favoriserait les mêmes opportunités qu’un dispositif par entretiens ou réunions. Des spécificités qu’il nous importe de visibiliser pour soutenir l’élargissement des formes de participation proposées aux parents et aux enfants.
Dans une démarche d’analyse du travail, enrichie d’apports du pragmatisme et de la phénoménologie, nous sommes ainsi allés étudier comment s’y prennent les professionnels dans ces moments pour favoriser l’intérêt supérieur de l’enfant, et ce, en prenant appui sur diverses données : observations, 3 films, 6 entretiens dits d’autoconfrontation. Notre recherche a abouti à la modélisation avec les professionnels de deux manières d’habiter ces moments. Ce n’est que dans une de ces deux modalités qu’il est considéré qu’ici et maintenant, entre les trois (parent-enfant-professionnel), l’air de rien, il se passe quelque chose d’important.
Article de David Pichonnaz, Kevin Toffel, Lilian Mathieu, et al.
Paru dans la revue Actes de la recherche en sciences sociales, n° 240, décembre 2021, pp. 4-77.
Mots clés : Travail-Emploi, Travail, Sociologie du travail, Profession, Socialisation, Enseignant, Militantisme, VAE, Expérience, Aide soignant, Qualification professionnelle, Diplôme, Organisation du travail, Université, Création d'entreprise, Taylor (Frederick Winslow)
- Pour une sociologie structurale du travail
- L’engagement enseignant des soixante-huitards
- L’expérience comme ressource alternative pour des femmes des classes populaires ? : passer le diplôme d’État d’aide-soignante par VAE
- Note de lecture : Taylor, la division du travail et les « espèces humaines »
- Les passeurs de l’entrepreneuriat à l’université
Article de Manuel Tavares, Mathilde Agron, Naima Gaillot, el al.
Paru dans la revue Thérapie familiale, vol. 42, n° 4, décembre 2021, pp. 275-288.
Mots clés : Santé mentale-Souffrance psychique, Accueil familial thérapeutique, Psychiatrie infantile, Famille d'accueil, Équipe soignante, Fin de la prise en charge, Relation adulte-enfant
Les auteurs exposent la particularité de l’accueil familial thérapeutique de leur service de pédopsychiatrie. Après avoir décrit le dispositif de cet accueil et en particulier sa règle fondamentale, les auteurs présentent trois vignettes cliniques qui mettent en évidence l’importance de la préparation à l’accueil, de la construction des liens et de l’élaboration de l’arrêt.
Article de Mathias Sabbe, Nathalie Schiffino, Stéphane Moyson
Paru dans la revue Les Politiques sociales, n° 3 & 4, décembre 2021, pp. 15-26.
Mots clés : Travail social : Métiers, Maison de justice et du droit, Assistance, Travailleur social, Risque, Récidive, Implication personnelle, Déontologie, Belgique
Au sein des Maisons de justice, des assistants de justice (AJ) sont chargés de la guidance des justiciables condamnés à une mesure probatoire. Ce travail est assorti de mesures de contrôle et d’assistance. Or, la tension qui accompagne ces deux missions est accrue par la hausse des exigences administratives et une importante scrutation médiatique en cas de récidive. Cette contribution explore la marge de manœuvre dont disposent les AJ dans l’exercice de leur fonction. Une analyse thématique conduite auprès de 29 AJ francophones révèle que – malgré un nombre croissant de dossiers, un temps limité pour les traiter et un contrôle managérial grandissant – les AJ ne donnent pas nécessairement la priorité aux profils les plus commodes. Au contraire, ils agissent prioritairement auprès des justiciables les plus problématiques. Cette bienveillance discrétionnaire est discutée au regard de la street-level bureaucracy (Lipsky, 2010). Elle s’explique autant par un ethos professionnel résistant aux injonctions néomanagériales que par un certain désir de préservation personnelle.
Dans cet article, une intersection entre thérapie systémique individuelle et approche systémique interculturelle sera illustrée par l’étude de cas d’une patiente franco-vietnamienne. Au départ, nous constatons peu de demandes d’aide psychologique émanant de la population asiatique présente en France et par conséquent le peu d’écrits ou de matériels théoriques disponibles. Cette observation nous amènera à concentrer notre intérêt sur la population d’Asie du Sud-Est et leur place particulière en France. Nous présenterons le suivi de Kim, d’origine vietnamienne, pour lequel les questions des violences intrafamiliales, du secret et de l’impact de la migration sur les relations se nouent.
L’espace Claude-Chassagny est un centre médico-psycho-pédagogique (CMPP) spécialisé qui propose une approche thérapeutique pluridisciplinaire du décrochage scolaire chez les adolescents (de 12 à 20 ans). D’un point de vue systémique, le décrochage scolaire est envisagé comme le symptôme qui témoigne d’une situation de mal-être d’un adolescent et d’un niveau d’alerte du fonctionnement du système familial. Au sein du CMPP, la mise en articulation du travail individuel avec un travail familial permet à l’adolescent d’accéder à l’autonomie en se libérant de loyautés aliénantes. Cette prise en charge psychothérapeutique s’inscrit également dans un travail de réseau qui implique la mise en articulation de l’ensemble des intervenants dans la situation de l’adolescent : école, famille, intervenants sociaux et institutions soignantes.