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La fabrique temporelle du consentement : les habitant·es des quartiers populaires dans l’attente du délogement

Article de Charles Reveillere

Paru dans la revue Actes de la recherche en sciences sociales, n° 250, décembre 2023, pp. 60-70.

Mots clés : Territoire-Logement, Logement, Quartier, Temps, Ethnographie, Précarité

Des travaux ont déjà montré que l’épreuve de l’attente transforme les attentes populaires : elle livre les individus à un temps vacant, pendant lequel les espérances se réduisent à petit feu ; elle leur fait vivre une temporalité arbitraire, où ils intériorisent une condition subordonnée. Cet article montre que l’attente peut aussi être une ressource de gouvernement des classes populaires pour des institutions qui cherchent non plus à leur faire accepter leur place, mais à les déplacer. S’engage alors un gouvernement des aspirations par l’attente, qui joue sur deux horizons temporels. D’un côté, il fait miroiter un avenir meilleur (ailleurs) ; de l’autre, il rend le présent insupportable (ici). Si bien qu’il ne laisse d’autre choix aux individus que d’être dans l’attente d’un changement à venir. La démonstration s’appuie sur deux ethnographies longitudinales, dans des quartiers populaires ciblés par des projets urbains impliquant le départ des habitant·es. L’auteur va voir ce qu’il se passe quand il ne se passe (apparemment) rien, dans la période d’attente qui sépare les premières annonces d’un déplacement à venir et le moment de sa mise en œuvre. Il décrit des politiques qui placent les individus sur le qui-vive pendant des années, en prévision d’un changement qui pourrait arriver à tout moment, mais qui se fait attendre. En destinant les habitant·es à une mobilité future, ces politiques impulsent une dynamique de projection qui rend le présent inhabité. En plaçant en suspens la gestion de ces territoires, elles dégradent leurs conditions actuelles d’existence, au point de rendre le présent inhabitable. Contraintes symboliques et matérielles s’articulent pour fabriquer le consentement des habitant·es au départ : ils et elles en viennent à souhaiter partir, pour en finir au plus vite avec cette attente devenue trop éprouvante, quitte à accepter des modalités de départ bien en deçà de leurs espérances.

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