Documentation sociale

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Comment se dessinent les fins d'accompagnement

Article de Claudine Hourcadet, Alexia Serré, Justine Vleminckx, et al.

Paru dans la revue L'Observatoire, tome 103, avril-juin 2020, pp. 5-81.

Mots clés : Accompagnement de la personne et identité, Accompagnement social, Relation d'aide, Intervention sociale, Analyse de la pratique, Autonomie, Toxicomanie, Prostitution, Santé mentale, Attachement, Famille d'accueil, Adolescent

Dans l’état social actif, les fins d’accompagnement sont presque systématiquement programmées, elles font partie d’un processus vu en étapes, construit par paliers, amenant la personne présentant des difficultés et des manques, à acquérir progressivement des compétences et des capacités qui, in fine et idéalement, devraient lui permettre de quitter son statut de bénéficiaire et retrouver une pleine autonomie !

Dans la réalité, les fins d’accompagnement s’inscrivent bel et bien dans une temporalité déterminée, certes éventuellement aménageable, mais elles ne vont pas nécessairement de soi, ni pour les personnes aidées, ni pour les professionnels. De même, elles n’aboutissent pas toujours aux objectifs définis. Certaines peuvent surprendre positivement et correspondre à un réel envol, une autonomie plus affirmée, mais d’autres peuvent se solder par des échecs, des abandons, des retours à la case départ, créant des questionnements et parfois des sentiments d’inachevé, de crainte, de culpabilité, ... surtout quand les personnes se volatilisent vers un ailleurs inconnu et une possible errance.

Cependant, ce qui caractérise particulièrement ces fins, est certainement qu’elles n’en sont pas ou rarement ! Ainsi, bien souvent, elles ouvrent plutôt sur de nouveaux commencements : une nouvelle prise en charge, une nouvelle structure, un nouvel encadrement, plus léger ou mieux adapté, et parfois, un nouveau départ dans un lieu de vie à soi, avec la mise en place de services en satellites.

On retrouve ici, sinon l’idée de paliers, celle de continuité où les fins méritent d’être préparées car elles font partie intégrante du processus ; voire même d’être pensées dès le départ, en même temps que les objectifs qui, eux-mêmes, évolueront tout au long. Cette préparation passe par des moments d’écoute, d’échanges et de parler vrai avec la personne mais aussi par une attention portée à la façon de faire lien avec elle puisqu’il faudra inévitablement le défaire... Elle nécessite aussi de la part des équipes des réunions, des supervisions, des rencontres avec l’entourage, les tiers, les éventuels mandants, et aussi des adaptations, de l’imagination, du réseautage pour créer des pistes et des alliances pour l’après. Enfin, quand le moment approche, la pratique du tuilage permettra, si l’on en prend soin, d’assurer au mieux la passation, le relais et de réduire le risque que la personne, traînant déjà parfois dans son parcours nombre de ruptures et d’abandons, ne se sente (une nouvelle fois) « lâchée ».

Ces fins, qui veillent à la continuité et peuvent paraître sans fin, travaillent sur le front de la prévention, tendant à éviter aux personnes les plus fragilisées, les rechutes, les enlisements et les tombées à pic dans des situations de plus en plus complexes et dégradées. Elles viennent questionner ainsi le sens et les finalités autonomistes du travail social contemporain, soumis à des logiques managériales et gestionnaires où la segmentation du temps sert l’évaluation. A moins que, prises sous un autre angle, elles n’interrogent nos capacités à oser la rupture ou tout au moins le lâcher-prise.

L'autonomie en tension

Article de Christian Bergeron, France Defrenne, Christophe Bartholome, et al.

Paru dans la revue L'Observatoire, n° 88, juillet-septembre 2016, pp. 5-71.

Mots clés : Accompagnement de la personne et identité, Autonomie, Soin, Handicap, Majeur protégé, Personne âgée, Accompagnement social, Logement, Insertion sociale, Travailleur social, VULNERABILITE, EMPOWERMENT

En ces temps de crise, les politiques sociales tendent à faire rimer autonomie avec activation, contractualisation et responsabilisation, la transformant en une injonction qui n’est pas sans paradoxes... L’autonomie demeure néanmoins un idéal émancipatoire qui occupe une place centrale dans les pratiques psycho-médico-sociales, animant des professionnels soucieux de faire avec l’usager plutôt qu’à sa place, de le rendre acteur et de l’aider à s’émanciper.
L’autonomie semble aujourd’hui érigée comme un idéal performant à atteindre, une forme de liberté suprême, garante sinon de bonheur, de la joie de ne dépendre de personne. Comme si dépendre des autres, de l’autre, était devenu insupportable. C’est là sans doute une conséquence d’une société qui pousse chacun plus avant dans l’individualisme.
Pourtant, l’autonomie n’a pas toujours eu ce relent de chacun pour soi, elle a d’abord été émancipation : du patriarcat, du conservatisme, de la raideur, de l’autoritarisme patronal, universitaire, parental...
Dans les politiques sociales, l’autonomie a pareillement été comme une révolution pour changer les règles, cesser de voir de haut celui qui d’en bas demandait de l’aide. Elle s’est donné comme objectifs sous-jacents de faire "avec" plutôt que "pour", d’apprendre, d’expliquer, d’accompagner, de solliciter l’avis, de solliciter la participation, de susciter la motivation, l’adhésion...
Cette vision de l’autonomie où la personne est acteur, sujet, et l’intervenant, relais, facilitateur, accompagnateur, est toujours présente et prégnante dans tous les secteurs du social. Et on la retrouve d’ailleurs dans de nombreux textes, décrets, règlements, principes de dispositifs et référentiels pédagogiques. Mais, aujourd’hui, la crise installant une pénurie des moyens réclamant sans cesse des économies, des restrictions, amène des politiques sociales d’un autre ton, surtout quand y est liée une allocation. L’autonomie rime désormais aussi, et non sans paradoxes, avec activation, responsabilisation, contractualisation.
Ce que nous voulions relever de la place d’observateurs que nous occupons est que, tout d’abord, qu’on le veuille ou non, l’autonomie occupe une place importante dans les pratiques. Ensuite qu’il existe à son égard une extrême diversité de significations, interprétations, connotations. Il s’ensuit ainsi une cacophonie où tout le monde a l’impression de parler de la même chose et qu’au fond, il n’en est rien. Inévitablement, cela génère des tensions dans l’équipe, entre les équipes, dans la conscience professionnelle de chacun, dans le rapport à la hiérarchie et aux politiques publiques. De toute évidence, ce flou mérite qu’on s’y arrête...