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Paru dans la revue Les Politiques sociales, n° 3 & 4, automne 2020, pp. 45-58.
Mots clés : Ecole-Enseignement, Enseignement supérieur, Élève, Enquête, Aménagement du temps, Activité, Implication personnelle
Dans cet article sont examinées les normes d’emploi du temps dans les classes préparatoires scientifiques aux grandes écoles, et à l’entrée dans une grande école d’ingénieurs. Les données ont été collectées au cours d’une enquête ethnographique de quatre ans au sein de la communauté des élèves de l’École Centrale Paris (ECP). Si les activités des élèves changent entre les classes préparatoires et la grande école, certaines normes temporelles persistent : dans les deux cas, il leur est demandé d’avoir un usage rationalisé, intensif et maîtrisé de leur temps, en l’assignant à certaines activités. Ce qui change est la forme que cela prend. En classe préparatoire, il est enjoint aux élèves de consacrer leur temps au scolaire ; en grande école existent des injonctions à s’engager, en plus des activités scolaires, dans les activités associatives de l’école.
L’article présenté expose et interroge la mécanique d’une recherche-action menée de mai 2017 à juin 2018 à la Haute École Léonard de Vinci (Bruxelles, Belgique). Il revient d’abord sur la thématique de cette recherche – et, pour ce faire, sur la spécificité de la demande initiale émise par la direction de l’institut nous sollicitant – ainsi que sur le contexte sociétal dans lequel le projet de formation que celle-ci défend s’inscrit. Ensuite, l’article reprend les définitions de la rechercheaction, mises en perspective avec le processus implémenté et les résultats obtenus. Enfin, la conclusion revient sur notre appropriation de la méthode de la rechercheaction et met en évidence sa fécondité pour l’élaboration de nouveaux cours de l’enseignement supérieur non universitaire.
La production d’une « noblesse scientifique », à travers les concours scientifiques de l’ENS, et, en amont, pendant les deux ou trois années de classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) scientifiques, produit un ordre scolaire, non seulement social mais aussi sexué. Les mécanismes qui président au maintien de ces bastions de l’élitisme scolaire comme entre-soi bourgeois et masculin sont ici analysés à l’aune de la définition de l’excellence scolaire qui y a cours, à partir d’une enquête par questionnaire conduite auprès de 2 270 élèves de classes préparatoires scientifiques. Dans ces classes, les caractéristiques du bon élève de lycée ne constituent que des conditions nécessaires de la réussite scolaire, non des conditions suffisantes. Ces dernières sont alors à trouver dans un ensemble de qualités naturalisées esquissant une idéologie du don. Celle-ci se voit intériorisée par les élèves et l’urgence scolaire caractéristique des CPGE la justifie sous couvert de l’impliquer.
La relation de complémentarité fonctionnelle entre les tâches d’enseignement et de recherche dans le travail académique varie beaucoup selon les pays. Les travaux sur le cas français suggèrent que l’organisation des corps d’enseignants-chercheurs et le système des carrières académiques n’ont pas connu d’évolution profonde depuis trois décennies. En analysant la composition des corps universitaires français et les séquences de leurs carrières, nous mettons en évidence le développement d’une catégorie de personnels trop négligée par la littérature : les enseignants du secondaire affectés dans le supérieur, qui composent un cinquième des effectifs titulaires universitaires. L’affectation de ces personnels exclusivement enseignants obéit à trois logiques distinctes : le soutien à l’enseignement dans les filières et les institutions à fort investissement pédagogique ; l’apport en personnel à des filières nouvelles ; la sélection probatoire pour l’accès à des postes d’enseignant-chercheur. Ces trois usages de l’affectation interviennent à des degrés variables dans les différentes filières disciplinaires et institutionnelles de l’enseignement supérieur français, selon que l’enseignement y est complémentaire ou exclusif de l’activité de recherche.
Paru dans la revue Revue française de sociologie, vol. 58, n° 2, avril-juin 2017, pp. 233-266.
Mots clés : Ecole-Enseignement, Égalité des chances, Sélection, Établissement scolaire, Sociologie, Éducation, Classe sociale, Enseignement supérieur, Rite, Représentation sociale, Angleterre, Oxford
Initiés au début des années 2000, les dispositifs d'ouverture sociale de l'université d'Oxford cherchent à assurer la candidature d'un nombre plus élevé d'élèves issus de milieux modestes. À partir d'une approche inspirée par la sociologie des marchés, cet article illustre les modalités par lesquelles ces dispositifs tentent de coordonner une offre de formation élitiste et une demande de formation d'un public populaire. Le processus repose sur trois étapes : il segmente les publics en proposant une offre de formation à court terme, calibrée pour des élèves aux dispositions sociales et scolaires particulières ; il joue sur l'adaptation de l'offre d'Oxford aux dispositions sociales attendues des candidats, qui repose à la fois sur une neutralisation sociale des espaces et sur l'explicitation sur un ton personnel et ludique de l'offre de formation et de ses spécificités ; enfin, ce processus tente de minorer le rôle des enseignants dans le cadre de la construction des aspirations des élèves, soit en les limitant à un rôle d'encadrement matériel, soit en s'assurant de leur loyauté. Il s'agit alors moins de convertir les élèves à des codes sociaux particuliers que de jouer sur leurs dispositions actuelles afin qu'ils adhèrent à l'offre. Alors que l'approche par la socialisation est généralement mobilisée pour comprendre les effets sociaux de ces dispositifs sur les dispositions et les aspirations scolaires des élèves, l'approche par la captation éclaire un processus d'interaction entre un individu et une institution qui, précisément, ne relève pas d'une socialisation.
Paru dans la revue Revue française de sociologie, n° 57-2, avril-juin 2016, pp. 241-268.
Mots clés : Ecole-Enseignement, Immigration-Interculturalité, Enfant de migrant, Immigré, Personne issue de l'immigration, Scolarité, Orientation scolaire, Enseignement supérieur, Histoire familiale, Enquête
Cette étude vise à renouveler la réflexion sur les aspirations scolaires des descendants d’immigrés en s’appuyant sur une description approfondie des configurations familiales et du cadre spatio-temporel dans lequel les individus ont migré. D’après l’enquête « Trajectoires et Origines » (Ined/INSEE, 2008) et à caractéristiques sociales et scolaires proches, les petits-enfants d’immigré.s scolarisés au lycée, majoritairement d’origine européenne, se caractérisent par une plus grande irrésolution que les enfants d’immigrés et les autres élèves face aux études longues. Nous montrons que les ressources liées à la position sociale des familles dans le pays d’origine rendent intelligibles les écarts observés entre enfants et petits-enfants d’immigré.s. La déception des parents de la deuxième génération quant à l’enseignement supérieur auquel beaucoup ont accédé à partir des années 1980 constitue par ailleurs une piste pour comprendre les hésitations des petits-enfants d’immigré.s. Le passé migratoire familial permet alors de caractériser plus finement les effets de l’origine sociale que ne le font les indicateurs usuels de profession et de diplôme des parents.