" Une laïcité d'exclusion est le meilleur ennemi de l'égalité. " Au nom de la laïcité (en particulier de la neutralité de l'Etat et de son devoir à protéger l'autonomie individuelle), les pouvoirs publics ne peuvent pas se décharger de la construction de la fraternité et de l'animation du lien social. L'objectif du dossier de ce numéro n'est pas de rallumer ou de souffler sur les braises d'une nouvelle " guerre de la laïcité ". Il est de contribuer, modestement et en toute sérénité, à penser cette revendication de laïcité, généralisée dans notre société, à prendre la mesure du fait religieux contemporain mais aussi à appréhender les solutions que les professionnels de l'éducatif et du médico-social trouvent pour faire face aux situations où la laïcité est concrètement interrogée. Comment rendre la laïcité porteuse d'émancipation et d'égalité dans l'entreprise, dans la banlieue, dans les services publics, dans les services éducatifs et partout où le vivre ensemble suppose fraternité ? Comment s'y prendre pour être garant du respect des croyances des personnes accueillies tout en leur donnant les moyens de leur émancipation ? N'est-ce pas là l'un des défis du travail social aujourd'hui ?

Les trajectoires des jeunes qualifiés d'« incasables », semble-t-il aujourd'hui relativement nombreux, viennent interroger la notion de continuité éducative. Ces jeunes qui passent d'un établissement à l'autre mettent en lumière ce qui peut sembler insuffisant en matière d'articulation des diverses interventions. Le lien entre continuité éducative et contenance sera ainsi interrogé, au regard des évolutions contemporaines du travail social.

C'est par le débat, l'échange, la recherche des connaissances multiples, la volonté de favoriser la porosité des institutions concernées et des parties prenantes que l'Association nationale des Maisons d'enfants à caractère social fera reconnaître l'identité des mecs, pour permettre de répondre de la manière la plus adaptée à chaque situation confiée.

Longtemps, l'institution a été dénoncée comme un espace d'assujettissement des individus. A l'heure de la désinstitutionnalisation, on redécouvre sa dimension humanisante. Sans se départir d'une approche critique, l'institution peut aussi être envisagée comme l'espace de la mise en ouvre d'un projet d'humanité. Pour ce faire, il y a au moins deux écueils à éviter : d'une part, rêver de restaurer à l'identique les institutions d'antan et, d'autre part, idéaliser les nouvelles formes institutionnelles, souples et partenariales, censées échapper aux pesanteurs des institutions classiques. Cette contribution s'emploie à dégager quelques orientations qui pourraient contribuer à faire exister de nouvelles formes institutionnelles capables de garantir la prise en compte de la singularité des personnes, tout en redonnant sens et consistance au collectif et au vivre ensemble.