Mettant en questions le montage actuel de l’Assistance éducative judiciaire, ce texte vise à faire résonner en quoi la confusion des places (du juge et de l’éducateur) et des discours (juridique et non juridique) qui s’y implique, participe de la même confusion des registres – du subjectif et de l’institutionnel –, de la même régression du mythe parental et indifférenciation des figures fondatrices Père et Mère –, que celles qui irradient la scène familiale des cas à traiter.

Ainsi que nombre d’observations l’attestent, le management s’étend comme un phénomène irrésistible au secteur associatif de l’aide et de la protection de l’enfance. Il s’y répand en confortant la pente qui entraîne les vieilles associations à se tenir, sous des expressions diverses, pour des instances souveraines, quasi féodales. La volonté technique de maîtrise, étendue au pouvoir sur autrui, son désir et ses comportements, tend à l’emporter sur toute autre considération existentielle. La parole est discréditée. Le sujet du management associatif ne saurait ainsi exprimer quelque refus par rapport à ce « dispositif » et ce « bien » auxquels il est prié d’adhérer. Aussi ce texte se propose comme une contribution pour découvrir dans ce secteur, selon la formule de Pierre Legendre, « les moyens de civiliser le Management ».

Si l’AEMO et l’AED ont une vocation clinique commune – celle d’être une médiation éducative visant à étayer la fonction parentale et à trianguler la scène de vie de l’enfant –, alors une AEMO, comme le cas présenté en rend compte, ne saurait « réussir » là où une AED ne l’aurait pu.

Si les juges des enfants ont un rôle clef dans la protection de l’enfance, celui-ci tient d’abord à leur capacité à faire jouer en droit le principe d’indisponibilité des places, l’écart structurel entre les fonctions. Les effets cliniques de leur intervention tiennent donc bien davantage au rituel judiciaire, à la façon dont jugements et ordonnances font (ou non) jouer la limite, l’espace de séparation entre les figures et les scènes, et à la triangulation (l’espace tiers) qui en procède pour l’enfant, qu’à quelque « colloque singulier du juge avec l’enfant ».