Insécurité et peur du crime sont constitutifs du fonds de commerce de lextrême-droite. Linsécurité est devenue, en trente ans, omniprésente dans le débat public
Les attentats terroristes ont porté le thème à lincandescence. La théorie des réfugiés qui tentent de gagner lEurope accroît encore la tension. Le rejet xénophobe quelle suscite contribue à fusionner la peur du délinquant et celle du terroriste dans une crainte de limmigré. Les territoires où l'insécurité prospère ne sont pas toujours ceux où la délinquance fleurit le plus ; les plus insécures ne sont pas toujours les plus exposés. Linsécurité ne se développe pas nécessairement à cause de la criminalité, mais souvent plutôt à propos delle.
Pour sécarter dun essayisme flou, les auteurs analysent les données précises sur les peurs et la préoccupation sécuritaire. Sur un tel socle, il est ensuite possible de pointer les mécanismes de linsécurité et de chercher les couches sociales qui y sont sensibles. Jouer de linsécurité est dautant plus tentant pour les politiques comme pour les médias quelle a de profondes résonances sociales. La droite tenaillée par la concurrence de lextrême-droite hésite de moins en moins à semparer de linsécurité pour en faire un outil de gouvernement. La gauche, faute dêtre parvenue à définir une politique efficace de sécurité, sest réfugiée dans une position assez inconfortable où elle cherche avant tout à échapper à laccusation de laxisme. Ne voit-on pas sinstaller finalement un État sécuritaire ? Dans létat de fragilité de nos démocraties, nest-ce pas céder à un jeu dangereux ?
Sociologues tous deux directeurs de recherches au CNRS Philippe Robert et Renée Zauberman travaillent de longue date sur linsécurité et la mesure de la délinquance au sein du Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP). Ils dirigent actuellement un Observatoire scientifique du crime et de la Justice (www.oscj.cesdip.fr)[présentation de l'éditeur]